La fusillade de la Brasserie Nouvelle  


 

 

FUNTANONU. 

La place Jules Mondoloni à Petreto-Bicchisano


 

Juin 43. La Corse vit sous la botte fasciste. Une armée de 80 000 hommes, un militaire pour trois habitants, a envahi nos villes et nos villages. Après sept longs mois de répression féroce, l'envahisseur doit se rendre à l'évidence, les Corses sont encore debout.

 

Le succès du mois de mars avec le démantèlement d'un réseau F. F. L. est resté sans lendemain. Son chef, Fred Scamaroni, s'est donné la mort dans sa prison sans livrer à l'ennemi la moindre information. Les petites organisations de résistants, trop vulnérables, se sont ralliées à un puissant mouvement structuré, cloisonné, discipliné et combatif: le Front national de libération au sein duquel on retrouve dans un coude à coude fraternel, sans distinction d'origine ou de condition, tous ceux qui sont fermement résolus à se battre jusqu'à l'éviction de l'occupant.

 

Ce mouvement reçoit, parachutées, des dizaines de tonnes de matériel de guerre qui viennent s'ajouter à celles déposées dans les criques de la côte Corse par le sous-marin Casabianca.

 

L'intense et fiévreuse activité de la clandestinité préoccupe au plus haut point l'ennemi. Il pense tenir le remède à tous ses ennuis lorsque dans l'après-midi du 17 juin, il apprend que des responsables du F. N. sont réunis dans une salle de la Brasserie Nouvelle à Ajaccio.


Leur arrestation ne pose apparemment aucune difficulté. L'ennemi sait pouvoir compter sur l'habileté de ses tortionnaires pour arracher les renseignements qui permettront de porter à la Résistance un coup dont elle ne se relèvera pas.

C'était aller un peu vite en besogne et faire preuve de la plus totale méconnaissance des hommes qu'ils s'étaient donnés pour but d'éliminer.

Deux d'entre eux mettront en pièce ce plan mirifique. Deux hommes aussi différents que peuvent l'être un paysan et un citadin mais qu'unissaient leur amour de la liberté et leur attachement viscéral à la mère Patrie.

Jules Mondoloni, responsable militaire et l'un des organisateurs du F. N. à Petreto-Bicchisano et sa région, André Giusti, responsable départemental du renseignement, avaient dit NON à Pétain et à la collaboration. Ils seront parmi les premiers à se dresser face à l'envahisseur.

Ils ont vite jugé de la situation. Le passage en force à travers le barrage humain n'aurait qu'une chance de succès sur mille. Ils vont la tenter. Après avoir abattu trois de leurs assaillants, ils tombent sous le nombre.

Grâce à leur sacrifice, les camarades présents pourront en réchapper et reprendre leur place dans les rangs des combattants.

Trois corps sans vie, ceux des carabiniers et agents de l'OVRA, c'est tout ce que l'agresseur aura recueilli d'une opération sur laquelle il comptait beaucoup pour mettre à mal la Résistance.

L'écho de la fusillade de la Brasserie Nouvelle retentira à travers toute l'ile, insufflant à la Résistance l'élan qui conduira à l'appel à l'insurrection lancé par le F. N. Le 9 septembre 43, aux combats libérateurs qui feront de la Corse, selon le mot du Général de Gaulle, "le premier morceau libéré de la France".

JÉRÔME SANTARELLI

Déporté, Résistant

Président départemental de l'ANACR

Bulletin des Amis de la Résistance de Petreto-Bicchisano N° 2 Avril 2000

 http://www.resistance-corse.asso.fr 


 

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